Sonnets

du

Pied de la Côte
I

Haut dans les airs, l’oiseau glisse, vivante plume,
Sur le chemin, tiré par deux lourds chevaux bruns,
Un char de paille va cahotant, pesante enclume,
Semant des petits brins pareils à des embruns.

Au bord des routes blanches s’entassent les agrumes,
Les bûcherons bras nus brandissent un à un
Des haches tournoyant comme celles des Huns,
Quand jadis ils allaient guerroyant dans la brume.

Quatre coups résonnent là-haut dans le clocher
Où l’hirondelle a pris ses quartiers pour nicher,
Fuyant ce carillon, gravant des lettres fines

Au-dessus des granges qui recèlent le foin,
Elle fait quelques tours, file dans le lointain,
Revient, vivante flèche, ombre de Mélusine.
II

C’est de vieux villages, comme d’autres villages
Plutôt petits, aux grandes maisons, toits brunis,
Ils font face à la pente, ils n’ont déjà plus d’âge,
Murs de pierres, poutres de bois, volets vernis.

C’est de vieux villages, ils ont pour cathédrales
De hautes granges à pont, aux nefs gorgées de foin,
Aux chenaux de bois dur, de monstres il n’y a point,
En place de flèche, un conduit vertical.

C’est de vieux villages, dessous de larges croupes,
Assemblés en leur nid, les foyers se regroupent,
Dont les noms sont gravés sur la pierre et le marbre :

Ici gît tel ou tel, fils ou fille de tel ou telle,
1900 et quelque, c’était une année belle,
C’était pour elle et lui qu’ils ont planté cet arbre.
III


Cailloux polis le long de tortueuses ornières
Faisant sauter du banc le paysan assis
Qui balance les pieds entre les limonières,
Encourageant, parfois, un vieux cheval tout gris,

De la voix, à tirer sur cette pente rude,
Le petit char à cercles aux flancs remplis de paille,
Jusqu’au point de passage en ce lieu dit la Faille,
Où passe emmitouflée une vieille trop prude.

Les yeux fixés en bas, la pipe entre les dents,
Il voit briller l’Arnon, les coteaux, les sarments,
Et le replat du lac et ses bleus de gentiane ;

Le char à ridelles branlant sur le chemin
Grimpe cahin-caha au pas du pèlerin,
Lui tire sur les guides et crie : « Allez, hue Diane ! »
IV


Les bras croisés sur la poitrine, en longs cortèges,
Ils vont à petits pas en tanguant sous le poids
Des boilles de métal, quel étrange charroi
Que tous ces paysans ! que le ciel les protège !

Ils vont et viennent là où les chemins convergent,
Ils se penchent comme pour la bénédiction,
Le laitier, au crayon, inscrit les additions,
Debout sur les carreaux que les flaques submergent.

Ils reviennent d’un pas plus rapide et léger,
Les jeunes gens pressés traversent les vergers,
Poursuivant en secret des amours clandestines,

Ceux que l’âge a courbés éprouvent le besoin
D’aller goûter au vin, objet de tous les soins,
Des tantes du Cercle, c’est pourquoi ils trottinent.
V


Les saisons se défont, voici le temps d’automne,
C’est le temps des récoltes et des champs labourés,
Des troupeaux qui s’en vont, en file, par les prés,
Guidés par des enfants dont les fouets tourbillonnent.

En bas de la côte, les vendangeurs s’étonnent
De la belle chaleur, des beaux raisins pressés,
Ceux d’en haut à genoux dans des sillons tracés,
Une main sur les reins, se relèvent et bougonnent.

Ils regardent les brumes, en revenant du lait,
Sortir de leurs logis, citernes des chalets,
Les plus vieux, frissonnant, regagnent les cuisines,

Les jeunes, deux par deux, qui sont tout pleins d’ardeur,
Se rendent à l’auberge, et là dans la tiédeur,
Ils y boivent  du vin et des verres de fine.


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